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Travaux obligatoires du bailleur : peut-on ne pas payer son loyer ?
En tant que locataire, vous n’avez pas le droit d’interrompre le paiement de votre loyer, et ce même si un ou plusieurs litiges sont en cours avec votre bailleur.
Quel que soit le motif de votre désaccord et même si votre propriétaire refuse d’exécuter des travaux qui sont à sa charge (voir ici), vous ne pouvez vous faire justice vous-même (arrêt de la Cour de Cassation du 5 octobre 2017).
Avant d’interrompre tout paiement de loyer, vous devrez obtenir une autorisation préalable du juge (voir plus bas). En cas de non-respect de cette règle, les risques sont alors multiples.
Risques si je ne paye pas mon loyer :
- Résiliation de votre bail
- Mise en difficulté de la personne qui s’est portée garante (parent, proche, etc.) et vers qui pourra se retourner légalement votre bailleur
- Interruption de versement de votre aide au logement si votre bailleur signale la situation à la CAF
- Intervention d’un huissier
- Procédure judiciaire
- Expulsion
- …
Ainsi, si votre propriétaire refuse de faire les travaux que vous lui demandez, veillez à passer par la voie légale pour obtenir gain de cause afin de ne pas vous mettre en difficulté.
Une seule exception : votre logement est inhabitable
Une seule et unique situation pourra éventuellement vous autoriser à ne plus payer votre loyer : si vous êtes dans l’impossibilité totale d’utiliser le logement que vous louez.
Il faut, cependant, que le caractère inhabitable de votre logement réponde à des critères très précis tels que :
- Humidité très importante vous contraignant à quitter les lieux
- Logement sans chauffage, sans eau chaude
- Risque d’incendie trop élevé ou installation électrique dangereuse
- …
Dans la plupart des cas, des rapports d’expertise devront avoir été menés avant l’interruption du paiement du loyer afin de justifier votre geste. Ainsi, afin d’être certain de respecter le cadre légal, faites-vous conseiller par un avocat ou une aide juridique avant d’interrompre le paiement de votre loyer (voir ici comment consulter un avocat gratuitement ou en cliquant ici pour avoir une réponse rapide d’un avocat par téléphone).
Il existe cependant d’autres solutions pour contraindre votre propriétaire à effectuer des travaux, notamment en bloquant vos loyers à la Caisse des dépôts et consignations (plus d’infos ci-dessous).
A noter : En dehors des travaux qui doivent être pris en charge par votre bailleur, il peut être intéressant de connaître les travaux sans accord du propriétaire.
Comment exiger des travaux du propriétaire : les étapes à suivre
En cas de litige avec votre propriétaire, plusieurs recours légaux sont possibles. Si vous souhaitez contraindre votre bailleur, par exemple, à effectuer les travaux, veillez à respecter les étapes ci-dessous. Sachez toutefois que vous ne pourrez obtenir gain de cause si vous attendez de votre bailleur qu’il réalise des travaux qui ne lui incombent pas.
Voici les travaux à la charge du bailleur :
- Les travaux urgents de réparation (panne de chaudière par exemple)
- Les travaux d’entretien du logement nécessaires au maintien en l’état (volets défectueux par exemple)
- Les travaux d’amélioration des parties communes d’un immeuble (ravalement de façade par exemple)
- Les travaux relevant de la décence de votre logement (en savoir plus) : cette notion est définie par la loi afin d’obliger le propriétaire à faire les travaux nécessaires à l’occupation des lieux
- Les travaux liés à l’amélioration énergétique du logement (isolation par exemple)
Il existe de nombreux dispositifs afin d’aider les bailleurs et les locataires à réaliser des travaux dans un logement. Selon vos besoins, découvrez la liste des dispositifs ci-dessous :
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Certains se présentent sous la forme d’une aide financière non remboursable et pour d’autres, une demande de prêt aidé travaux devra être effectuée. Avant toute démarche, il est souvent nécessaire de présenter un devis pour vos travaux.
Étape n°1 : tentez de trouver une solution à l’amiable avec votre bailleur
Même si cela paraît évident, veillez à toujours tenter une solution à l’amiable avant d’entamer toute procédure. Dans le cas d’une éventuelle procédure judiciaire, vous devrez en effet prouver que vous avez tenté de trouver un accord en premier lieu.
Pour cela, commencez par envoyer une lettre simple à votre bailleur pour faire votre demande. Veillez à conserver une copie de ce courrier.
Si celui-ci refuse ou ne répond pas à votre demande, vous pouvez alors tenter d’envoyer un deuxième courrier, cette fois sous la forme d’une lettre recommandée avec accusé de réception (il est possible de le faire directement en ligne, consultez cet article pour en savoir).
Enfin, si les deux premiers courriers ne vous donnent pas satisfaction, vous pouvez alors adresser à votre propriétaire une mise en demeure (voir de quoi il s’agit) dans laquelle vous lui faites part de votre intention d’entamer une procédure judiciaire si vous n’obtenez pas gain de cause. Cela pourra peut-être le persuader de répondre favorablement à votre demande.
Étape n°2 : saisir la Commission de conciliation de votre département
Spécialisées dans les litiges entre propriétaires et locataires, les Commissions de conciliation peuvent être saisies gratuitement.
Pour cela, envoyez une lettre recommandée avec avis de réception à la Commission de conciliation de votre département en y mentionnant :
- Les raisons du litige avec votre bailleur
- Une demande de convocation de votre bailleur
- Vos coordonnées et celles de votre propriétaire
- Les documents justificatifs éventuels
Si la Commission parvient à trouver une solution à l’amiable, un procès-verbal est alors dressé. Dans le cas contraire, elle émet un avis qui ne possède pas de valeur particulière devant un tribunal, mais qui pourra toutefois être étudié par les juges si vous entamez ensuite une procédure judiciaire.
Bon à savoir : cette étape n’est pas obligatoire. Vous pouvez donc entamer une procédure judiciaire sans avoir saisi préalablement la Commission de conciliation.
Étape n°3 : saisir le tribunal d’instance pour les travaux incombant aux propriétaires
Si vous n’avez pu aboutir à un accord, votre dernier recours est de saisir le tribunal d’instance. Cela permettra alors l’étude de votre dossier par un « juge des loyers » qui rendra une décision entre 3 et 6 mois après votre saisine. Vous pourrez aussi, en saisissant le tribunal d’instance, demander une consignation de vos loyers (voir paragraphe suivant).
Si la procédure est gratuite, les frais annexes éventuels (avocats, huissier, etc.) sont à votre charge. Rendez-vous ici pour retrouver la procédure de saisine du tribunal d’instance.
À noter : si vous entamez une procédure judiciaire pour contraindre votre propriétaire à réaliser les travaux de mise en conformité de votre logement jugé comme non décent, il est possible que le juge décide de baisser le loyer le temps que le chantier aboutisse.
Étape n°4 : bloquez vos loyers à la Caisse des Dépôts et Consignations
Si vous ne pouvez, légalement, décider seul d’interrompre le paiement de votre loyer, vous pouvez, en revanche, faire consigner votre loyer auprès de la Caisse des Dépôts et Consignations le temps de régler votre litige. Cela doit être une décision rendue par la juge lors de la saisine du tribunal d’instance.
Pour entamer la procédure de consignation de vos loyers, vous devez :
- Saisir le tribunal d’instance (voir étape précédente) et obtenir l’autorisation d’un juge pour effectuer la consignation de vos loyers
- Télécharger et compléter le dossier de la CDC
- Envoyer votre dossier par courrier à l’adresse communiquée par la CDC (pour obtenir l’adresse qui vous correspond, tapez le numéro de votre département dans la barre de recherche du site de la CDC)
- Suivre la procédure demandée par la CDC afin de verser votre loyer sur un compte où il sera bloqué et obtenir un justificatif de consignation
Quelle que soit la solution retenue, les loyers seront ensuite déconsignés et versés à votre propriétaire ou à vous-même en fonction de la nature de l’accord ou de la décision de justice.
Attention : vous devez impérativement obtenir l’autorisation d’un juge d’instance avant de bloquer votre loyer. En revanche, il n’est pas obligatoire de faire appel à un avocat pour cette démarche.
Crédit photo : © Comugnero Silvana / Fotolia
Journaliste/Rédactrice, je possède dix ans d’expériences professionnelles web et rédaction et travaille pour le site aide-sociale.fr depuis 2017. Ma connaissance fine des questions juridiques et du dispositif administratif et social en France me permet d’informer au mieux les lecteurs sur leurs droits et les démarches utiles en fonction de leur situation.