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Personnes fragiles : que dit la loi contre les frais bancaires abusifs ?
Chaque année en France, 1/3 des clients des banques est concerné par un incident de paiement. Ces frais représentent un chiffre d’affaires très important pour les banques, 6,5 milliards d’euros. Mais dans le même temps, ils aggravent les difficultés financières des détenteurs de comptes bancaires et les plus démunis sont particulièrement vulnérables.
Depuis 2014, l’état a mis en place la notion de fragilité financière qui a imposé aux banques de proposer aux clients les plus en difficulté un statut spécifique qui les protège en cas d’incidents répétés.
Cette notion a évolué, et le 1er novembre 2020 une nouvelle loi qui encadre les frais bancaires pour les personnes en situation de fragilité bancaire est entrée en vigueur.
Loi sur les frais bancaires : qu’appelle-t-on “situation de fragilité bancaire”
Pour être reconnu client fragile depuis novembre 2020 par un établissement bancaire, il faut être dans une situation qui corresponde à l’un de ces critères :
- Avoir totalisé 5 incidents de paiements ou irrégularités au cours d’un même mois
- Avoir un dossier de surendettement en cours
- Être inscrit pendant 3 mois successifs au fichier central de la Banque de France des incidents de paiement de chèques (consultez toutes les infos sur le fichage à la Banque de France)
En juillet 2020, la Banque de France a publié le rapport annuel de l’OIB (Observatoire de l’inclusion bancaire) qui précise qu’à la fin de l’année 2019 3,4 millions de clients des banques françaises étaient identifiés comme financièrement fragiles.
Quels sont les frais bancaires maximum pour les personnes fragiles ?
Si un client connaît 5 irrégularités sur son compte au cours d’un même mois, les frais que la banque peut lui imputer sont plafonnés. Ce client doit alors, et de façon automatique, être considéré comme fragile.
Par conséquent, la banque ne peut pas pénaliser ce client à son bon vouloir. Elle a pour obligation de limiter les frais bancaires à 25 euros par mois, et ce pendant une durée fixe de 3 mois.
Un exemple pour bien comprendre
Un établissement bancaire constate 4 incidents de paiement sur le compte courant d’un client. Les incidents intervenus sont les suivants :
- Un dépassement de découvert qu’elle facture 8 euros
- Le rejet d’un chèque de 70 euros qu’elle facture 50 euros
- Le rejet d’un autre chèque de 35 euros qu’elle facture 30 euros
- Le rejet d’un prélèvement automatique qu’elle facture 20 euros
À ces frais bancaires s’ajoutent les frais de commissions d’intervention, 8 euros par irrégularité de paiement soit :
4 x 8 euros= 32 euros
Au total, les incidents de paiements coûtent à ce client :
8 €+ 50 €+ 30€+20€+ 32€ = 140 euros
Si ce même client avait présenté au cours du mois un incident de paiement supplémentaire sur son compte, soit un total de 5 irrégularités, les frais bancaires n’auraient pas pu excéder 25 euros au total pour le mois !
De plus, ces conditions de plafonnement des frais bancaires s’appliquent automatiquement pendant les 2 mois suivants, quel que soit le nombre d’incidents au cours de cette période.
Important : le montant des frais bancaires plafonné à 25 euros s’applique à toutes les personnes fragiles, à l’exception des clients qui bénéficie de l’offre “Client fragile” par leur banque. Pour eux, le montant des frais mensuels reste plafonné à 20 euros comme auparavant.
Frais abusifs d’une banque : bien comprendre les services payants
Bénéficier d’un compte dans un établissement bancaire est un service que la banque vous facture. Ainsi à l’ouverture de votre compte courant, le conseiller bancaire établit une convention de compte qui répertorie l’ensemble des engagements de la banque et de vous-même pour le fonctionnement de votre compte.
Ces engagements doivent être respectés de part et d’autre dès lors que vous avez signé cette convention contractuelle. La banque vous fait payer pour le service de tenue de votre compte.
À cela peuvent s’ajouter d’autres prestations comme :
- La délivrance d’une carte bancaire
- Une autorisation de découvert bancaire avec application d’agios proportionnels ou forfaitaires
- Un accès à vos comptes à distance
- Le retrait d’espèces au distributeur
- La mise en place d’un virement…
Vous pouvez choisir le ou les services qui correspondent à vos besoins ou opter pour un pack qui comprend un ensemble de services. Ces services que vous acceptez ont un coût annoncé qui est en général prélevé directement sur votre compte bancaire.
Vous ne pouvez pas contester ces montants dus s’ils correspondent à la convention de compte que vous avez signée. Il est important de savoir que les montants des frais de tenue de compte ne sont pas encadrés par la loi. C’est la banque qui les établit, libre à vous de les accepter ou de changer d’établissement bancaire. Rien ne vous empêche de tenter une négociation avec votre banquier avant la signature.
Au-delà de ces services de fonctionnement d’un compte bancaire, d’autres frais existent. Ce sont les frais consécutifs à un incident de paiement comme :
- Agios à taux majoré pour le dépassement du découvert autorisé
- Coût pour le rejet d’un chèque
- Tarif de la Commission d’intervention pour incident bancaire
- Frais pour le rejet d’un prélèvement
Ces frais bancaires concernent des incidents de paiement et sont plafonnés par la loi. Ils ne peuvent donc dépasser certains montants :
- Dès le premier euro dépensé au-delà du découvert autorisé, la banque est en droit d’appliquer des agios à taux majoré, proche du taux d’usure qui est actuellement de 21,16%
- Si la banque vous refuse un dépassement de découvert, les chèques que vous établissez ne sont pas payés par la banque et il vous en coûte : 30€ par chèque d’une valeur inférieure ou égale à 50€ / 50€ par chèque rejeté dont la valeur dépasse les 50€ / 20€ par opération de prélèvement ou virement rejeté
- À chaque fois que la banque fait appel à la Commission d’intervention, vous êtes redevable de 8€. Les frais engendrés par la commission sont plafonnés à 80€ par mois
Nous ne pouvons que vous recommander de vérifier les montants des frais facturés par votre banque, ainsi que les opérations correspondantes. Encore aujourd’hui de trop nombreux clients se plaignent de voir une opération rejetée en raison d’un solde négatif alors qu’une entrée d’argent intervient dans la même journée.
Si vous considérez que le montant des frais facturés dépasse les termes de votre contrat ou si vous détectez une anomalie dans vos comptes comme un prélèvement que vous n’avez pas autorisé, n’hésitez pas à demander un complément d’information et à contester les faits si nécessaire. Vous pouvez consulter les frais de découvert que vous allez payer.
Frais bancaires trop élevés : quels sont les recours possibles ?
Rien n’est plus désolant que de devoir payer des frais à votre banque en plus du découvert auquel vous êtes confronté. Mais il est toujours possible de négocier le montant des frais bancaires voire de demander leur remboursement.
Plusieurs recours sont possibles, nous vous suggérons d’utiliser les différents moyens dans l’ordre où nous avons choisi de vous les présenter.
Remboursement des frais bancaires : prendre contact avec votre banque
Vous devez commencer par vous rapprocher de votre conseiller bancaire si vous vous retrouvez dans une des situations suivantes :
- Vous constatez sur votre compte courant une erreur de la banque, c’est une situation rare, mais possible
- Vous contestez ou souhaitez négocier les frais bancaires qui vous sont imputés
Le plus simple est de prendre rendez-vous avec votre conseiller afin qu’il puisse étudier votre requête avec vous. Ce dernier dispose d’une marge de manœuvre suffisante pour alléger ou rembourser vos frais bancaires. Selon votre situation, il peut même vous aider à formaliser votre demande par écrit que vous adresserez à votre banque.
Nous vous proposons un modèle de lettre demande de remboursement de frais bancaires abusifs :
Vos noms, prénoms, adresse, téléphone et adresse mail
Votre numéro de compte
Les coordonnées de votre banque
Date
Objet : remboursement de frais bancaires
Madame, monsieur,
Je sollicite de votre bienveillance le remboursement des pénalités que votre établissement m’inflige en raison d’un incident de paiement (indiquez ici le libellé des frais qui est inscrit sur votre relevé de compte). Le montant de ces frais s’élève à (indiquez le montant).
Je reconnais avoir eu un compte débiteur et je dois cette situation à (expliquez en quelques mots les circonstances qui vous ont conduit à cette situation).
Je me permets de vous rappeler que je suis un fidèle client de votre établissement, et c’est pourquoi je vous prie de bien vouloir m’accorder, à titre exceptionnel, une annulation de ces frais qui compliquent le redressement de ma situation financière.
Je vous remercie par avance pour votre compréhension et je reste à votre disposition pour toute information complémentaire.
Veuillez agréer, Madame, Monsieur, mes salutations distinguées.
Signature
Contactez le médiateur bancaire en cas d’échec avec votre conseiller
Si vous n’êtes pas parvenu à un accord directement avec votre banque, nous vous conseillons ensuite la démarche suivante :
- Adressez tout d’abord au service clientèle de votre banque un courrier recommandé avec accusé de réception qui indique que vous refusez de payer les pénalités qui vous sont imputées
- Puis, si dans un délai de 2 mois rien ne se passe suite à votre courrier, saisissez le médiateur bancaire. Vous pouvez le faire en ligne ou par courrier
Cette procédure peut prendre plusieurs mois, mais elle est entièrement gratuite. Elle a pour objectif d’obtenir une conciliation entre vous et votre banque.
Toutefois pour que votre démarche auprès du médiateur bancaire soit prise en compte, sachez que vous devez impérativement démontrer que vous avez essayé de résoudre par vous-même le différend qui vous oppose à votre banque.
Il convient alors de présenter au médiateur votre situation. Nous vous conseillons également de lui transmettre une copie des courriers que vous avez adressés à votre banque ainsi que des réponses que vous avez obtenues si tel est le cas. En cliquant ici, vous trouverez un modèle du courrier que vous pouvez adresser au médiateur bancaire.
Le médiateur doit vous répondre dans un délai de 90 jours après que votre saisine soit reconnue recevable. Il vous soumet alors une proposition que vous êtes libre d’accepter ou de refuser.
Derniers recours pour des frais bancaires importants : l’action en justice
Si vous n’avez pas obtenu de solution convenable auprès de votre banquier ou du médiateur de la banque, il vous reste la possibilité de saisir la justice pour raison de litige avec votre banque.
Sachez que vous pouvez recourir à cette solution à tout moment, sans délai particulier à respecter. Cependant dès que vous saisissez le tribunal compétent, vous ne pouvez plus faire appel au médiateur de la banque.
Selon les sommes pour lesquelles vous êtes maintenant en litige avec votre établissement bancaire, vous vous adressez à la juridiction compétente, à savoir:
- Pour des sommes inférieures ou égales à 10.000€ : adressez-vous au tribunal de proximité (anciennement tribunal d’instance, TI) ou au tribunal judiciaire (anciennement tribunal de grande instance, TGI)
- Si le montant dépasse les 10 000€ : contactez directement le tribunal judiciaire
Pour connaître les coordonnées du tribunal qui correspond à votre situation, entrez votre code postal ou le nom de votre commune en suivant ce lien
Les associations peuvent vous aider à contester les frais bancaires
Si la case “banque” est un passage inévitable pour vous, retenez qu’il est important d’établir une relation de confiance avec votre conseiller de compte. Soyez honnête et pensez à le prévenir si vous avez connaissance par exemple d’une dépense importante qui va faire passer votre compte en rouge sur une courte période.
C’est une idée communément admise que les banques favorisent davantage les riches que les personnes aux revenus modestes. Mais elles n’aiment pas voir partir leurs clients, alors n’hésitez pas à dialoguer, négocier et surtout à faire valoir vos droits.
Les différentes associations de consommateurs sont très mobilisées sur toutes les questions qui concernent les banques et leurs services tarifaires. Si le litige qui vous oppose à votre banque n’a pas abouti à une solution convenable après médiation, vous pouvez soumettre votre contentieux à une association de consommateurs, généraliste ou spécialisée.
Ces associations sont là pour informer sur les dérapages en matière d’abus bancaires :
- La CLCV (Consommation, Logement et Cadre de Vie), Que choisir ou 60 millions de consommateurs sont des associations généralistes qui orientent les usagers des banques
- L’AFUB, association française des usagers des banques, et l’ADEFAB, association de défense contre les abus bancaires, sont des associations spécialisées qui peuvent vous conseiller dans vos démarches
En 2014, la loi bancaire de juillet 2013 associée au Plan contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale a permis l’installation d’un observatoire de l’inclusion bancaire, OIB, en partenariat étroit avec la Banque de France. Son rôle premier est de suivre les pratiques des banques afin d’identifier des améliorations possibles. Cet organisme est accessible uniquement par l’intermédiaire d’une association ou d’un Point Conseil Budget.
Une autre mesure du Plan contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale est la mise en place de Points Conseil Budget (PCB). Ces structures d’accueil sont chargées de renforcer les conseils et la médiation pour les ménages financièrement fragiles.
Le PCB a pour mission d’accueillir toute personne qui rencontre des difficultés budgétaires et qui sollicite un accompagnement. Il s’agit alors de prévenir le surendettement et de contribuer à l’éducation budgétaire.
Enfin, La Banque de France propose sur le site “Mes questions d’argent” un portail de ressources en matière d’éducation budgétaire et financière.
Si cela n’aboutit pas, vous pouvez faire appel au médiateur bancaire Lire la suite
Crédit photo : © StockUnlimited
Depuis mon entrée dans l’équipe du site aide-sociale.fr en 2018, j’ai à cœur de partager ma connaissance des aides sociales existantes et des démarches administratives. Je m’y emploie en les expliquant de la façon la plus exacte et la plus claire possible afin de les rendre accessibles à tous.