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Aide financière pour les victimes de violences conjugales : un des volets du pack Nouveau Départ
Face à la hausse des violences conjugales en France ces dernières années, le gouvernement a mis en place une mesure d’urgence pour aider les victimes à se protéger et à se reconstruire : le pack Nouveau Départ.
Accès à un hébergement d’urgence, garde d’enfant, soutien psychologique, aide à l’insertion professionnelle, entrée en formation… Ce dispositif n’est rien de moins qu’un accompagnement global pour une prise en charge à 360 des femmes battues. Et parmi ces multiples aides, une aide universelle d’urgence pour les victimes de violences conjugales dont le cadre et les modalités d’attribution ont (enfin !) été établis par un décret publié au Journal officiel le 24 novembre 2023.
L’aide universelle d’urgence est un dispositif financier qui peut être accordé sous forme de don ou de prêt sans intérêt et qui permet aux victimes de violences conjugales de quitter leur domicile, de se mettre à l’abri et de subvenir à leurs besoins essentiels.
Son montant varie selon les ressources de la victime (et uniquement d’elle, et non du foyer) et le nombre d’enfants à sa charge.
À compter du 1er décembre 2023, il est donc possible de bénéficier de cette aide, sous certaines conditions, conditions que nous détaillerons dans la partie suivante de cet article.
Bon à savoir : lorsque l’aide est versée sous la forme d’un prêt sans intérêt, l’auteur des violences peut être condamné à rembourser ce prêt à la place de la victime.
Aide financière pour femmes battues : les conditions à respecter
Pour bénéficier de l’aide universelle d’urgence aux victimes de violences conjugales, il faut remplir les conditions suivantes :
- Être en situation régulière sur le territoire français (hors visa de tourisme).
- Avoir subi des violences (physiques, sexuelles, psychologiques, etc.) de la part de son conjoint, de son concubin, de son partenaire de pacs ou de son ex. Il n’est pas nécessaire que la victime vive ou ait vécu avec l’auteur des faits.
- Avoir des preuves des violences commises.
Apporter une preuve des violences subies
Pour ce dernier point, le décret est formel : 3 types de preuves sont acceptées. Les voici :
- Une ordonnance de protection : il s’agit d’un document délivré par le Juge aux affaires familiales (JAF) dans un délai de 6 jours après l’audience, si les faits de violence sont vraisemblables et mettent en danger la victime ou les enfants du couple.
- Un dépôt de plainte : il peut se faire auprès de n’importe quel service de police ou de gendarmerie sur le territoire national. En revanche, la recevabilité de la plainte relève du procureur de la République.
- Un signalement adressé au procureur de la République : dans ce cas de figure, c’est un tiers (et non la victime elle-même) qui prend les devants et informe le parquet de la situation subie par la victime ou ses enfants.
Un critère de ressources pour l’aide sous forme de don (et pas sous forme de prêt)
Pour recevoir l’aide universelle d’urgence en tant que don, la victime ne doit pas dépasser un certain seuil de ressources. Celui-ci dépend du nombre d’enfants à charge et est calculé en fonction du SMIC net mensuel. À ce titre, les montants seront actualisés chaque année au 1er avril suivant l’évolution du Salaire minimum de croissance.
En 2024, les plafonds à ne pas dépasser sont les suivants :
Situation familiale | Plafonds de ressources (net par mois) |
---|---|
Une victime sans enfant | 2 098,05€ (soit 1,5 SMIC) |
Une victime avec 1 enfant à charge | 3 147,07 € (soit 2,25 SMIC) |
Une victime avec 2 enfants à charge | 3 776,49 € (soit 2,7 SMIC) |
Une victime avec 3 enfants à charge ou plus | 4 615,71 € (soit 3,3 SMIC) |
Si les ressources de la victime dépassent les plafonds ci-dessus, l’aide est accordée sous forme de prêt. Le remboursement est dû par l’auteur des faits s’il est condamné. Si ce n’est pas le cas, il sera à la charge de la victime de le rembourser.
Un montant basé sur le RSA et modulable selon la situation de la victime
Le montant de l’aide universelle d’urgences pour les victimes de violences conjugales est basé sur celui du RSA et varie suivant les ressources de la demandeuse ainsi que sa situation familiale (nombre d’enfants à charge).
Montant de l’aide universelle d’urgence
Ressources mensuelles | Une personne seule | Une personne avec 1 enfant | Une personne avec 2 enfants | Une personne avec 3 enfants | En + pour chaque enfant supplémentaire |
---|---|---|---|---|---|
Ressources inférieures ou égales à 699,35 € (soit 0,5 SMIC net) – 1398.69 | 635,70 € | 953,56 € | 1 144,27 € | 1 398,55 € | 254,27 € |
Ressources entre 699,35 € et 1.398,70 € (soit entre 0,5 et 1 SMIC net) | 508,56 € | 762,85 € | 915,41 € | 1 118,84 € | 203,41 € |
Ressources entre 1.398,70 € et 2.098,04 € (soit entre 1 et 1,5 SMIC net) | 381,42 € | 572,13 € | 686,56 € | 839,13 € | 152,56 € |
Ressources supérieures à 2.098,04 € (soit plus de 1,5 SMIC net) | 254,27 € | 381,42 € | 457,70 € | 559,41 € | 101,70 € |
Bon à savoir : durant les 6 mois qui suivent le versement de l’aide financière pour femme battue, la demandeuse peut profiter des avantages et des prestations liés au RSA, comme l’attribution automatique de la Complémentaire santé solidaire par exemple.
Aide universelle d’urgence pour les victimes de violences conjugales : les démarches
Pour recevoir cette enveloppe de plusieurs centaines d’euros, la victime doit impérativement fournir un document attestant des violences subies (une des 3 preuves présentées un peu plus haut dans cet article) datant de moins de 12 mois.
Elle a alors plusieurs possibilités pour effectuer sa demande :
- directement à sa Caisse d’allocations familiales (Caf) ou à sa Caisse de la mutualité sociale agricole (MSA) en remplissant un formulaire dédié ;
- en ligne sur les sites de la Caf ou de la MSA ;
- au moment de déposer sa plainte ou de signaler les faits au procureur de la République. Dans ce cas, un formulaire simplifié de demande est envoyé automatiquement à la Caf ou à la MSA.
L’instruction de la demande est très rapide : à partir du dépôt du dossier, la Caf et la MSA s’engagent à le traiter dans un délai de 3 à 5 jours et à verser l’aide en une seule fois dans ce court délai. Et pour cause, les victimes de violences conjugales doivent fuir du domicile et se mettre à l’abri le plus vite possible.
Bon à savoir : il n’est pas possible de faire une demande d’aide universelle d’urgence pour femme battue si la victime n’a déposé qu’une main courante.
Aide financière lors de violences conjugales : des limites pointées par les associations
Sur le papier, cette aide financière s’ajuste parfaitement au dispositif Pack Nouveau Départ et permet d’offrir aux victimes de violences conjugales un soutien financier rapide pour quitter dans les plus brefs délais leur domicile et se mettre à l’abri. Pourtant, les conditions d’attribution de cette enveloppe sont aujourd’hui pointées du doigt, à la fois par les associations d’aide aux femmes battues, mais aussi par le groupe écologiste au Sénat.
En effet, les associations de soutien et d’accompagnement aux victimes de violences conjugales estiment que les plaintes ou les ordonnances de protection prennent trop de temps face à l’urgence des femmes qui veulent s’échapper du foyer familial. Elles souhaiteraient que leur structure puisse établir des attestations de suivi qui suffiraient à débloquer l’aide d’urgence universelle. Le Gouvernement n’a pas accepté leur demande. Par contre, il a annoncé l’étude à l’Assemblée nationale d’un projet de loi créant une ordonnance de protection « immédiate », pour réduire les délais de cette procédure de 6 jours à 24 heures.
Autre problématique : le fait que seules les victimes en situation régulière sur le territoire français puissent bénéficier de ce coup de pouce financier. Selon ces mêmes associations, fermer la porte aux femmes sans papier reste une injustice et ne devrait pas exister dans le pays de l’égalité et de la fraternité.
Du côté du groupe écologiste au Sénat, celui-ci a présenté un amendement afin de « augmenter le nombre de professionnels pouvant constater des violences psychologiques et physiques » et y ajouter le médecin généraliste, les médecins urgentistes, le médecin gynécologue, le psychologue ou le psychiatre et les assistants sociaux. L’objectif : compenser le manque de dépôts de plainte et faciliter encore davantage l’accès à l’aide universelle d’urgence. Quand on sait que seuls 25 % des victimes de violences conjugales signalent les faits à la police ou à la gendarmerie selon l’enquête de victimation « Genese 2021 », on peut comprendre ce point de vue. Malheureusement, cet amendement a été rejeté.
À voir ce que donneront les premiers chiffres maintenant que le dispositif est officiellement lancé…
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Crédit photo : © Serhii / Adobe
Depuis 2019, je dédie ma plume aux aides sociales et aux démarches administratives. Mon objectif : vous offrir un maximum d’informations, tout en vulgarisant ce que j’aime appeler « le langage Caf ». Pour que chacun puisse bénéficier des prestations auxquelles il a droit !