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Article 214 du Code civil : la définition de contribution aux charges du mariage
« Le mari est obligé de fournir à la femme tout ce qui est nécessaire pour les besoins de sa vie selon ses facultés et son état. Sur les biens dont elle a l’administration, la femme doit contribuer proportionnellement à ses facultés et à celles de son mari tant aux frais du ménage qu’à ceux d’éducation des enfants communs […] » — Article 214 du Code civil
Qu’est-ce que la contribution aux charges du mariage ?
Il est impossible de parler de contribution aux charges du mariage sans évoquer l’article 214 du Code civil. C’est cet article qui offre la meilleure définition et un cadre à cette obligation maritale, malgré une première phrase qui peut sembler un brin désuète, voire complètement sexiste. Voici, en langage plus accessible que le jargon juridique, ce qu’il faut retenir !
La contribution aux charges du mariage est une obligation qui pèse sur les époux mariés, quel que soit leur régime matrimonial (c’est-à-dire même s’ils ont opté pour un contrat de mariage). Il s’agit d’une participation aux frais de la vie courante du foyer. En pratique, cela inclut les dépenses quotidiennes liées :
- Au logement (crédit immobilier, loyer, ameublement, entretien, électricité, gaz, etc.)
- À la nourriture (courses, restaurants, etc.)
- À la santé (rendez-vous médicaux, traitements et soins, etc.)
- À l’éducation et l’entretien des enfants (habillement, consultations chez le pédiatre, fournitures scolaires, etc.)
- Aux loisirs (vacances, activités sportives, etc.)
Les deux époux sont donc obligés par la loi à participer aux charges de leur mariage (au sens large du terme) à hauteur de leurs possibilités. Cette contribution peut se faire en argent, mais pas seulement ! En effet, il est tout à fait envisageable de s’entendre sur une autre répartition : entretien du foyer et des enfants pendant que l’autre époux travaille ou encore fourniture de l’appartement par l’époux seul propriétaire par exemple.
Quelles sont les différences entre contribution aux charges du mariage, solidarité des dettes ménagères et devoir de secours ?
Nous venons de voir juste au-dessus la définition de la contribution aux charges du mariage. Il est à présent important de distinguer cette obligation d’autres obligations maritales comme la solidarité des dettes ménagères et le devoir de secours.
Commençons par la solidarité des dettes ménagères. En une phrase : les deux époux sont responsables des dettes que l’un d’eux a faites pendant le mariage. Par exemple : si l’un des conjoints achète des meubles, des vêtements ou des jouets pour la maison ou pour les enfants, l’autre époux doit aussi payer ces dettes, même s’il n’était pas d’accord ou qu’il n’était pas au courant. Il y a bien évidemment une limite à cette solidarité : ce sont les dettes manifestement excessives (c’est-à-dire si l’un des conjoints fait des dépenses qui sont trop importantes ou qui n’ont rien à voir avec la famille, comme acheter une voiture de luxe ou jouer au casino).
Le devoir de secours, quant à lui, consiste à aider financièrement son époux ou son épouse en cas de besoin. Il s’agit donc d’une obligation ponctuelle et exceptionnelle. Par exemple : si un époux perd son emploi ou tombe malade, l’autre époux doit lui verser une pension alimentaire pour lui permettre de vivre. En d’autres termes, c’est la concrétisation de la promesse faite devant le maire : « les époux se doivent mutuellement respect, fidélité, secours et assistance ».
Bon à savoir : le devoir de secours existe même si les époux sont séparés ou en instance de divorce tant qu’ils ne sont pas officiellement divorcés.
Quand finit la contribution aux charges du mariage ?
La contribution aux charges du mariage prend fin dans les situations suivantes :
- Le divorce des époux : la contribution aux charges du mariage cesse à la date à laquelle le juge prononce le divorce.
- La séparation de corps des époux : la contribution aux charges du mariage se termine à la date à laquelle le juge prononce la séparation de corps.
- Le décès de l’un des époux : la contribution aux charges du mariage expire à la date du décès de l’époux. Toutefois, l’époux survivant peut demander au juge de lui accorder une pension alimentaire sur la succession du défunt sous certaines conditions.
Bon à savoir : la contribution aux charges du mariage ne s’interrompt pas si vous êtes séparés de fait. En effet, la séparation de fait n’existe pas aux yeux de la loi (contrairement à la séparation de corps qui implique une procédure spécifique).
Que faire si l’un des deux époux refuse de contribuer aux charges ?
À présent, après avoir abordé la théorie, voyons comment la contribution aux charges du mariage peut prendre place dans votre vie quotidienne.
Comment déterminer le montant de cette contribution ?
La contribution aux charges du mariage se fait de manière équitable : chacun des époux contribue à hauteurs de ses moyens financiers.
Par exemple : si vous gagnez 2 500 € par mois alors que votre conjointe n’en gagne que 800 €, vous devrez prendre en charge les deux tiers des dépenses.
Toutefois, vous pouvez également opter pour un partage différent (notamment si un des conjoints s’occupe de certaines tâches ou est propriétaire). Dans ce cas, vous devrez déterminer ensemble le montant et les modalités de la participation de chacun aux dépenses communes par le biais d’un accord écrit ou de votre contrat de mariage.
Quelles démarches faire pour obliger son époux à participer aux charges du mariage ?
Il peut arriver malheureusement qu’un conjoint ne s’engage pas autant qu’il le devrait dans son mariage et que des désaccords subviennent au sujet de la participation aux frais du foyer. Il existe deux solutions pour faire cesser cette situation.
Proposer une médiation familiale
La médiation familiale est un processus qui permet aux personnes en conflit dans le cadre familial de s’écouter, de s’exprimer et de négocier grâce à la présence neutre d’un tiers externe. Et cela fonctionne pour les couples mariés en désaccord sur la contribution aux charges du mariage !
Le médiateur familial sera la personne référente qui va vous aider à rétablir la communication, et surtout à trouver une solution au conflit. Il s’agit d’un professionnel diplômé, formé aux différentes techniques de médiation. Bien évidemment, il ne prend pas parti et n’a pas de pouvoir décisionnaire.
En pratique, les séances de médiation familiale durent de 1h30 à 2 heures et s’étalent sur une période allant de 3 à 6 mois. Leur nombre dépendra de votre situation et n’excède pas les 6 séances en général. Dans tous les cas, la présence des deux époux est obligatoire, même s’il est possible, dans certains cas (détention, éloignement géographique, etc.), d’opter pour une visioconférence. Sachez aussi que vos avocats peuvent également y participer.
À la fin de la médiation familiale, si vous avez trouvé un accord, vous pouvez demander son homologation à un juge. De cette manière, cet accord aura le même poids qu’un jugement. À l’inverse, si vous n’êtes pas parvenu à vous concilier sur le sujet, vous pouvez saisir le juge.
Enfin, si l’entretien d’information est gratuit, les autres séances vous seront facturées. C’est au médiateur d’établir ses tarifs, à moins que vous ne passiez par une association conventionnée par la Caf. Dans ce cas, le montant dépend de vos propres revenus.
Vous pouvez déterminer la répartition du coût de ces séances avec votre conjoint. En l’absence d’accord, il est divisé à parts égales entre vous et votre conjoint.
Bon à savoir : il est possible de bénéficier de l’aide juridictionnelle pour régler ces séances de médiation.
Prêt à vous lancer dans cette solution à l’amiable ? Vous pouvez trouver un médiateur familial :
- Au sein d’associations comme l’APMF (Association pour la médiation familiale) ou la Fenamef (Fédération nationale de la médiation et des espaces familiaux)
- À la Caf qui travaille avec des associations conventionnées
- Auprès du tribunal judiciaire ou de la cour d’appel qui pourra vous donner une liste de médiateurs familiaux agréés
- Par vos propres recherches en tapant « médiateur familial libéral » sur Google ou via le réseau MFDElib
Faire appel au Juge aux affaires familiales
Deuxième solution (ou solution ultime) : la saisine du juge aux affaires familiales.
Pour entamer cette démarche, vous n’avez pas besoin de passer obligatoirement par la médiation familiale (même si c’est fortement recommandé) ou de faire appel à un avocat.
Voici les étapes à suivre :
- Choisissez le tribunal compétent. Vous pouvez saisir le tribunal judiciaire du lieu où vous habitez ou celui du lieu où réside votre conjoint si vous êtes séparés (mais pas divorcés).
- Remplissez le formulaire de demande de contribution aux charges du mariage. Vous pouvez le remplir en ligne pour le télécharger ou le retirer au greffe du tribunal. Ce formulaire vous permet d’expliquer votre situation et de préciser le montant que vous demandez à votre conjoint.
- Envoyez ou déposez votre dossier au greffe du tribunal. Vous pouvez le faire sur place ou par courrier recommandé avec accusé de réception (n’oubliez pas d’y joindre les justificatifs demandés).
Bon à savoir : la démarche est totalement gratuite. Vous devez également indiquer l’adresse de votre conjoint pour qu’il soit informé de votre demande.
Notez tout de même que si vous sollicitez l’assistance d’un avocat, les frais engendrés seront à votre charge.
La procédure judiciaire et la décision du juge
Une fois votre demande transmise, le Juge aux affaires familiales va vous envoyer une lettre recommandée avec accusé de réception pour vous convoquer à une audience. Vous devez vous rendre tous les 2 au tribunal, avec ou sans avocat, pour vous exprimer devant le magistrat.
Si vous ne venez pas, le juge peut décider de reporter l’affaire à une autre date ou de se baser uniquement sur les éléments fournis par la personne présente pour rendre son verdict.
Si vous obtenez gain de cause, le juge détermine alors le montant de la contribution aux charges du mariage de votre conjoint et l’en informe par le biais d’un commissaire de justice.
Les voies de recours contre un jugement
Comme la très grande majorité des décisions juridiques, le jugement du Juge aux affaires familiales peut être contesté.
Si votre conjoint ou conjointe était présent à l’audience du juge, il doit faire appel du jugement dans le mois qui suit sa notification (les détails de cette démarche sont expliqués dans la notification). Toutefois, un avocat est obligatoire.
Si votre conjoint ou conjointe a été jugé en son absence, il peut contester le jugement en faisant opposition dans un délai d’un mois à partir du jour où il a reçu personnellement le jugement. Il doit alors envoyer une lettre recommandée avec accusé de réception au secrétariat-greffe du tribunal.
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Crédit photo : © Andrey Popov / Adobe
Depuis 2019, je dédie ma plume aux aides sociales et aux démarches administratives. Mon objectif : vous offrir un maximum d’informations, tout en vulgarisant ce que j’aime appeler « le langage Caf ». Pour que chacun puisse bénéficier des prestations auxquelles il a droit !